Notre histoire se passe à Johannesburg, la plus grande ville d’Afrique du Sud. En 2019, deux jeunes frères, Amir et Reez Cajee, décident de lancer leur plateforme d’investissement dans les bitcoins, la cryptomonnaie la plus importante, encore aujourd’hui.
Ils ont tous deux seulement 17 et 20 ans et c’est l’une des premières entreprises du genre sur le continent africain. Cette plateforme, ils la nomment Africrypt. Elle permet aux investisseurs de miser sur le bitcoin, en échange d’une petite commission.
Une promesse de rendement rapide
Dès fin 2020, ça y est, la valeur du bitcoin s’envole : le filon est le bon. De nombreux investisseurs sud-africains créent leur compte sur la nouvelle plateforme des deux frères. Amir et Reez font même une promesse : « Si vous investissez chez nous, vous pourrez obtenir un rendement de 10% par jour ! »
C'est douteux mais ça marche bien : les premiers clients commencent à obtenir des bénéfices, la publicité se fait par le bouche-à-oreille, les investisseurs sont de plus en plus nombreux. Alors Amir et Reez Cajee s’enrichissent. Ils posent sur les réseaux sociaux devant des voitures de sport et créent un site internet et un compte Instagram pour Africrypt. Ils embauchent du personnel et organisent même un événement dans un golf en bord de mer où sont invités les investisseurs.
Sur une photo, ils apparaissent tous deux assis sur des chaises en contre-plongée. Habillés en costume devant un néon. Néon violet en forme de continent africain, le logo d'Africrypt. Tout va pour le mieux, en tout cas pour l’instant...
Un vide législatif en Afrique du Sud
Mi-avril 2021, alors que le bitcoin est au plus haut face au dollar, les deux frères envoient un message électronique aux investisseurs : « La plateforme Africrypt est gelée. Nous sommes victimes d’un piratage informatique. Vous ne pouvez plus accéder à votre compte ni à votre argent. S’il vous plaît, ne prévenez pas les autorités : cela ralentirait le processus pour récupérer les fonds ».
Ce « piratage informatique » ressemble plutôt à une escroquerie. Les employés d’Africrypt n’ont plus les clefs de la plateforme. Et les fonds, tout l’argent, disparaît. 69 000 bitcoins à son niveau le plus haut jamais atteint, cela correspond à 4 milliards de dollars américains. 4 milliards transférés sur le dark web directement sur le compte des deux frères, rendant l’argent intraçable.
Amir et Reez Cajee sont introuvables. Peut-être sont-ils sur une île paradisiaque au bord d’une plage ? Peut-être dans une capitale européenne ? Ou toujours à Johannesburg ? Les investisseurs, eux, tentent alors de se tourner vers la justice sud-africaine. Mais elle est à ce moment-là impuissante. Il existe un vide législatif, aucune loi n’encadre les cryptomonnaies : elles ne sont pas considérées comme un produit financier en Afrique du Sud.
Aucune enquête ne peut être lancée. L’argent est perdu, certains investisseurs voient leur vie brisée. Africrypt, c'est la plus grande arnaque au bitcoin de l’histoire, selon le média américain Bloomberg.
RFI