Nokia va réduire ses effectifs de 16%
Nokia annonce le licenciement de 14.000 postes sur les 87.000 salariés que compte le groupe au niveau mondial. La nouvelle brutale est tombée ce 19 octobre. À Lannion, l’un des deux sites en France du pilier des Télécoms, le sentiment de lassitude est profond.
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Il y a moins d'un an, Nokia se félicitait de participer à l'installation d'un réseau mobile sur la Lune. Les difficultés du marché des équipements télécoms ramènent brutalement sur Terre le groupe finlandais, contraint de prendre des mesures drastiques. Jeudi, l'équipementier a présenté un nouveau plan de réduction des coûts, qui prévoit entre 9.000 et 14.000 suppressions d'emplois… soit jusqu'à 16 % de ses effectifs. La réaction en Bourse a été immédiate, l'action Nokia chutant de 4,4 % à la mi-journée.
Avec ce plan, le PDG, Pekka Lundmark, espère générer entre 800 millions et 1,2 milliard d'euros d'économies sur trois ans, dont 400 millions dès 2024. « Nous avons des employés extrêmement talentueux chez Nokia et nous soutiendrons tous ceux touchés par ce processus, promet le patron dans un communiqué. Revoir notre base de coûts est une étape nécessaire pour s'ajuster à l'incertitude du marché et pour sécuriser notre profitabilité et notre compétitivité. » La nouvelle interroge les analystes d'UBS : « Vu l'ampleur, cela reflète des perspectives difficiles pour l'activité », écrivent-ils dans une note.
L'objectif est de parvenir à un taux de marge opérationnelle d'au moins 14 % à long terme, contre 8,2 % sur les neuf premiers mois de 2023 et une fourchette de 11,5 % à 13 % espérée sur l'année complète.
Un creux cyclique
Il s'agit du second plan depuis celui de 2021 qui prévoyait déjà 10.000 suppressions de postes, soit 11 % des effectifs mondiaux. En France, 900 salariés avaient alors quitté le groupe. L'ampleur définitive de ces nouvelles économies dépendra certes de l'évolution des marchés sur lesquels Nokia opère. Mais dans le pire scénario, la masse salariale de l'entreprise aura ainsi fondu de 20 % entre 2021 et 2026, une cure d'amaigrissement sévère pour le grand rival d'Ericsson et de Huawei.
Comme son concurrent suédois, Nokia, recentré sur les équipements télécoms depuis la vente de ses téléphones il y a une dizaine d'années, est pénalisé par la baisse des dépenses des opérateurs télécoms dans la 5G. Cinq ans après les tout premiers déploiements en Asie et aux Etats-Unis, certains pays commencent à être bien couverts. Or la 6G n'est pas encore là pour offrir un relais de croissance, cette nouvelle technologie ne devant arriver qu'à l'horizon 2030.
Dans le détail, le groupe est surtout touché par le ralentissement en Amérique du Nord, son premier marché. Outre-Atlantique, « les clients continuent de privilégier les cash-flows et la réduction des inventaires », explique Nokia. A ce creux cyclique, habituel dans cette industrie, s'ajoutent les difficultés macroéconomiques liées à la guerre en Ukraine. La hausse des dépenses d'énergie pousse tous les opérateurs à tailler dans les coûts.
Ainsi, sur le troisième trimestre, les recettes de Nokia ont plongé de 20 % par rapport à l'été 2022, à 4,9 milliards d'euros, selon les résultats publiés jeudi. Sur les neuf premiers mois de l'année, la chute est moins forte (-5 %) mais plombe toutefois les comptes. Le résultat opérationnel a plongé de 21 % sur l'année en cours, le résultat net s'est écroulé de 36 %. Pour 2023, Nokia prévoit un chiffre d'affaires d'environ 23 milliards d'euros, entre -4 et +2 % sur un an, mais des analystes craignent un avertissement sur résultat.
« Le chiffre d'affaires net du troisième trimestre a été affecté par l'incertitude actuelle, mais nous prévoyons une amélioration saisonnière dans nos activités de réseau au quatrième trimestre », a voulu rassurer Pekka Lundmark. Pour mieux la capter, le groupe finlandais a donné plus de latitude opérationnelle à ses quatre divisions et réorganisé ses équipes commerciales.
Les entreprises, la nouvelle cible
Parallèlement, Nokia continue sa diversification vers les entreprises, conformément au virage stratégique engagé en début d'année. L'idée est de capter davantage de valeur en installant des réseaux privés (notamment 5G) dans les entreprises et l'industrie (ports, mines, grandes usines) pour ne plus dépendre uniquement des opérateurs télécoms.
Cette activité est en croissance (+5 %) mais représente à peine 10 % des ventes. Chez Ericsson, ce marché peine aussi à tenir ses promesses. Après avoir dépensé 6,2 milliards de dollars pour racheter Vonage, un spécialiste de la communication dans le cloud pour les entreprises, le groupe de Börje Ekholm vient tout juste de déprécier la valeur dans ses comptes de son nouvel actif.