L’Inde va retenter un alunissage avec la sonde Chandrayaan-3
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Après un échec en 2019, l’agence spatiale indienne cherchera à nouveau à se poser en douceur sur l’astre sélène avec un décollage prévu le 14 juillet 2023. Seuls les Russes, Américains et Chinois y sont pour le moment parvenus.
Le lancement de la sonde indienne Chandrayaan-3 ("chariot lunaire" en hindi) est désormais imminent. Elle devrait décoller le 14 juillet 2023 à 11h35 (heure de Paris) depuis le Centre spatial Satish-Dhawan sur la côte orientale de l’Inde. Avec, à son bord, un module de propulsion, un atterrisseur ainsi qu’un petit véhicule mobile qui devraient rejoindre la Lune au bout d’un voyage d’environ six semaines, le 23 ou le 24 août 2023. Si l’atterrisseur parvient à se poser en douceur sur notre satellite naturel, l’Inde deviendra la quatrième nation à réussir pareil exploit, après l’ex-URSS (mission Luna9 en février 1966), les Etats-Unis (mission Surveyor 1 en juin 1966) et la Chine (mission Chang’e 3 en décembre 2013). Outre les objectifs techniques et scientifiques de Chandrayaan-3, l’enjeu et le symbole politique sont donc de taille pour l’Inde et l’agence spatiale gouvernementale (ISRO) qui chapeaute la mission.
Erreur de logiciel
Atterrir de manière contrôlée sur l’astre sélène reste de fait une gageure. L’ex-URSS et les Etats-Unis ont échoué eux-mêmes à de nombreuses reprises. En 2019, la première tentative israélienne s’était soldée également par un échec, le vaisseau Beresheet ("genèse" en hébreu) s’écrasant dans la mer de la Sérénité suite à un problème de propulsion. Plus récemment, en avril 2023, la sonde japonaise Hakuto-R a fini, elle aussi, en lambeaux, dans le cratère Atlas, en raison d’une vitesse de descente mal maîtrisée. Il y a quatre ans, l’atterrisseur indien Chandrayaan-2 avait connu d’ailleurs le même sort. Même si la mise en orbite s’était effectuée sans encombre, le contact avait été perdu "à 2,1 kilomètres de la surface lunaire", indique l’ISRO, à cause d’une erreur de logiciel manifestement.
Plus de carburant disponible
Mais l’agence spatiale indienne a tiré de nombreux enseignements de ce crash. Elle a notamment perfectionné les ordinateurs de bord de l’atterrisseur, modifié le nombre de rétrofusées (quatre au lieu de cinq), renforcé mécaniquement les quatre pieds de l'enfin et augmenté la quantité de carburant disponible afin de pouvoir réaliser davantage de manœuvres. Contrairement à Chandrayaan-2, son successeur ne comprend en outre pas d’orbiteur équipé d’une panoplie d'instruments. Les tâches du module de propulsion seront ainsi simplifiées, permettant aux ingénieurs de se focaliser sur la phase cruciale et si délicate de l’atterrissage sur la Lune.
Profil et orbites successives de la mission Chandrayaan-3 qui mettra six semaines à atteindre son objectif. Crédits : ISRO
Mesurer des tremblements de Lune
D’une masse de 2148 kg, le module de propulsion comporte toutefois un instrument particulièrement intéressant pour l’étude des planètes extrasolaires. Dénommé SHAPE ("Spectro-polarimetry of Habitable Planet Earth"), il collectera des données sur la polarisation de la lumière reflétée par la Terre. Objectif : reconnaître et débusquer ainsi des rayonnements similaires qui seraient émis par des "exoplanètes pouvant être qualifiées d’habitables et abritant de possibles formes de vie", précise l’ISRO. Accusant 1752 kg à la pesée, le lander embarque pour sa part quatre instruments scientifiques. Ils permettront de mesurer la quantité de plasma ainsi que la conductivité thermique sur la surface lunaire, enregistrer des secousses sismiques et calculer de manière très fine la distance Terre-Lune grâce à un réflecteur fourni par la Nasa.
Une région qui recèlerait des glaces d’eau
Muni de caméras et de deux spectromètres, le petit rover à six roues (26 kg) se concentrera quant à lui sur la composition chimique et minéralogique du sol. Mais contrairement aux engins soviétiques, américains et chinois qui ont déjà analysé les roches et fines poussières lunaires, celui-ci évoluera à des latitudes bien plus élevées, à proximité du pôle Sud. Une région encore peu explorée mais particulièrement stratégique, puisqu’elle contiendrait des molécules d’eau glacée pouvant servir à alimenter des astronautes ou être dissociées en hydrogène et oxygène afin de fabriquer du carburant. C’est au niveau du pôle Sud de la Lune que les grandes puissances spatiales (Etats-Unis, Chine, Europe…) projettent d'ailleurs de construire des bases habitées dans le courant des années 2030.