Qui est "Amaterasu", l’extraordinaire rayon cosmique qui provoque la perplexité des astronomes ?
Une particule porteuse d'une quantité d'énergie considérable a été détectée par le réseau Telescope Array en 2021. Son origine est d'autant plus mystérieuse qu'elle semble provenir d'une zone de l'Univers dépourvue de galaxies.
Table of Contents (Show / Hide)
Une particule porteuse d'une quantité d'énergie considérable a été détectée par le réseau Telescope Array en 2021. Son origine est d'autant plus mystérieuse qu'elle semble provenir d'une zone de l'Univers dépourvue de galaxies.
D'où vient-elle ? Quel mécanisme a pu l'engendrer ? Les questions se bousculent autour d’une particule d’ultra-haute énergie détectée le 27 mai 2021, mais dont l’étude est à paraître dans la revue Science ce vendredi 24 novembre.
Une particule que rien n'a pu produire dans notre galaxie, ou celles qui la voisinent
Selon les chercheurs de l'Université d'Osaka (Japon), l'énergie de ce rayon cosmique est de 244.1018 eV. Cela représente 40 joules, soit environ la moitié de l’énergie cinétique d’une balle de tennis à 200 km/h, mais portée par une seule particule, sans doute un proton selon les chercheurs.
Rien dans notre galaxie n'a le pouvoir de la produire, ni dans les galaxies proches. Cette étrange particule a été baptisée "Amaterasu", du nom de la plus importante divinité de la religion shintoïque.
"Oh-My-God" versus "Amaterasu"
Son arrivée a été enregistrée par le Telescope Array, un réseau de 507 détecteurs répartis sur 700 km² dans l’Utah (Etats-Unis). Une vaste surface nécessaire puisque la probabilité d’observer un événement de ce genre est seulement d’une particule par siècle et par km².
Ainsi, aucune particule de ce niveau n’avait été observée depuis 1991 et "Oh-my-God", dont l'énergie atteignait 320.1018 eV, encore un peu plus que "Amaterasu".
Leur rareté les rend donc difficiles à étudier, et Amaterasu semble bien décidée à compliquer particulièrement la tâche des chercheurs. En effet, étant donné leur extraordinaire énergie, ces particules ne sont pas du genre à dévier de leur trajectoire. Donc, pour trouver leur lieu de naissance, il suffirait en théorie de remonter sa trace en ligne droite. Ce que les chercheurs de la collaboration Telescope Array ont fait…
L’ennui, c’est qu’ils sont tombés sur une structure bien particulière de l’Univers : un vide cosmique, autrement dit une bulle gigantesque dépourvue de galaxies, ou presque.
Une particule surgit du vide cosmique
Il semble bien improbable qu’une telle particule débordante d’énergie ait surgi de nulle part. D’autant plus que les candidats naturels à leur fabrication sont les événements les plus violents de l’Univers, à savoir les formations et collisions de trous noirs supermassifs. Des astres tapis au cœur des galaxies, et non dans le vide intersidéral…
Malgré tout, les chercheurs ont plusieurs scénarios pour expliquer Amaterasu. La particule, chargée électriquement, a pu être déviée par un champ magnétique extragalactique mais encore une fois, son énergie aurait dû la maintenir sur les rails. Il faudrait donc supposer que ces champs sont beaucoup plus intenses que prévu.
Autre solution : la particule aurait été émise dans notre environnement galactique proche, et non dans ce vide cosmique lointain, mais par un événement qui serait demeuré fort discret puisqu’aucun sursaut gamma ou autre brutale libération d’énergie n’a été détectée.
Dernière possibilité, de loin la plus excitante : cette particule serait issue d’une physique inconnue, au-delà du modèle standard de la physique des particules. Pour en savoir plus, les chercheurs vont devoir ajouter d'autres particules d’ultra-haute énergie à leur tableau de chasse, et si possible pas une tous les trente ans.
Dans ce but, la sensibilité de l’expérience Telescope Array va être considérablement augmentée avec le prochain ajout de 500 nouveaux détecteurs, passant la surface de capture à 2900 km²... Avec une sensibilité multipliée par 4, la hotte des chasseurs de particules devrait rapidement se remplir.