Coup d’État au Niger : le sentiment anti-français poussé par Wagner ?
Le sentiment anti-français à été poussé par Wagner lors du Coup d’État au Niger.
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Dimanche 30 juillet à Niamey, la présence de drapeaux russes dans la manifestation de soutien aux putschistes n’est pas passée inaperçue.
À nouveau, l’influence de Moscou est pointée du doigt dans la déstabilisation du pouvoir nigérien, marqué depuis le 26 juillet par un coup d’État militaire.
Et la crise politique interne dans le pays n’est pas sans rappeler les derniers événements au Burkina Faso ou encore au Mali. Éléments d’explications avec Lova Rinel, chercheure associée à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).
Y a-t-il des preuves de la présence russe au Niger ?
Lova Rinel : Non, pas à l'heure actuelle. Mais au Sahel, oui. Essentiellement au Mali où la présence russe a été recoupée par plusieurs publications et les propos d’Evgueni Prigojine (le patron de la milice Wagner, ndlr). Il est important ensuite de dissocier la présence russe de la présence de Wagner. Tout l’enjeu est de savoir qui tire les ficelles. Très concrètement, le rapport de force en Afrique est aujourd’hui favorable à Wagner et défavorable à Vladimir Poutine. La séquence du sommet Russie/Afrique, où Evguéni Prigojine apparaît aux côtés du chef du protocole de la Centrafrique, le démontre.
Certains observateurs parlent même de coup d’État prorusse…
Selon moi, le putsch n’est pas fomenté par Wagner, ni par Vladimir Poutine. Mais il tourne clairement à l’avantage de la Russie. S’agissant des drapeaux prorusses vus dans les manifestations au Niger, il s’agit clairement de drapeaux distribués dans la région par des éléments de Wagner. Ces derniers sont peut-être au Niger, mais au stade de surveillance. En tout cas, ils n’ont pas de présence dans les administrations, les cabinets. Wagner côtoyait probablement les milieux de l’opposition. Mohamed Bazoum, lui, (le président élu démocratiquement, ndlr) n’était pas "Wagner compatible".
La Russie joue-t-elle un rôle actif dans le ressentiment d'une partie de la population à l’égard de Paris ?
Il faut se pencher sur le discours informationnel. Et depuis plusieurs mois, cette propagande et ces messages anti-français sont poussés par Wagner sur Internet, essentiellement sur Facebook. Sur ce terrain, le travail de Mohamed Bazoum a été important. Il a notamment contribué à empêcher la venue de Kémi Séba (militant franco-béninois et soutenu financièrement par Wagner, ndlr) au Niger.
Le discours anti-français, entendu aujourd’hui, est instrumentalisé par Wagner, c’est un fait. Mais au Niger, ces mouvements sont liés à une insatisfaction politique interne et à ces nombreux débats sur le rôle de la France. Ce ressentiment existait déjà et Wagner s’en est simplement servi. Quant à l’opposition au Niger, elle veut profiter de ce moment, de ce sentiment anti-français dans la région, pour justifier un putsch et servir ses intérêts.