Voici l'exoplanète la plus brillante jamais découverte
Le télescope spatial Cheops a permis d’identifier une exoplanète ultra chaude recouverte de nuages métalliques qui réfléchissent 80% de la lumière qu’elle reçoit.
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Observée par l'instrument Cheops, cette planète "collée" à son étoile et chauffée à 2000°C ne devrait pourtant pas pouvoir conserver une atmosphère...
"J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages !", écrivait Charles Baudelaire (Petits poèmes en prose, 1869). Alors, que lui aurait inspiré l’existence de la planète LTT 9779 b ? Cette "Neptune chaude", observée à 264 années-lumière de la Terre, serait recouverte d’épais nuages de silicates mêlés à du métal comme le titane. Cette sorte de carapace fait d'elle le plus grand miroir jamais observé dans l’Univers : la planète, de 4,5 fois le rayon de la Terre, reflète 80 % de la lumière reçue de son étoile. En comparaison, notre planète ne renvoie que 30 % de la lumière du Soleil. La mesure de cet albédo a été obtenu à partir des données de l’instrument Cheops (CHaracterising ExOPlanet Satellite), lancé par l’Agence spatiale européenne (ESA) en décembre 2019. Ces travaux font l’objet d’un article paru dans la revue Astronomy & Astrophysics.
Une planète qui ne devrait pas exister
LTT 9779 b orbite près de son étoile, dont elle fait le tour en seulement 19 heures. Cette proximité fait qu’elle est chauffée à 2000°C ! Un véritable enfer… qui ne devrait pas exister, comme l’explique à Sciences et Avenir Vivien Parmentier, astrophysicien à l’observatoire de la Côte d’Azur et co-auteur de cette publication. "Nous n’avons encore jamais observé de planète de type « Neptune chaude », proche de son étoile, à une température supérieure à 1500°C. Au-delà, l’atmosphère s’évapore. Ainsi, toutes les planètes gazeuses découvertes très près de leur étoile sont des « Jupiter chauds », d’au moins dix fois le rayon de la Terre, donc assez massives pour retenir leur atmosphère par gravitation, contrairement aux Neptunes chaudes, plus légères."
L’atmosphère de LTT 9779 b pose donc question, ainsi que ces mystérieuses nuées. "De tels nuages de métal ont déjà été vus sur d’autres exoplanètes, mais plutôt à la limite jour-nuit où la température baisse, ce qui permet la condensation des vapeurs de silicates et de métal. En revanche, à plus de 2000°C, ils ne devraient pas exister", s’étonne le chercheur. Pour expliquer leur présence, l’équipe a finalement trouvé l’inspiration… dans une salle de bain ! "Lorsque l'on prend une douche, la condensation se forme soit parce que l’air se refroidit jusqu'à ce que la vapeur d'eau se condense, soit parce qu’on laisse couler l'eau chaude jusqu'à ce que des nuages se forment, car l'air est tellement saturé de vapeur qu'il ne peut tout simplement plus en retenir davantage. De même, LTT9779 b peut former des nuages métalliques malgré sa chaleur car l'atmosphère est sursaturée en vapeurs de silicate et de métal."
Le télescope spatial James Webb entre dans la danse
Et c’est sans doute cette armure de métal qui explique l’existence même de la planète. En renvoyant les 4/5e de l’énergie reçue par l’étoile, les nuages l’empêchent de trop chauffer. Par ailleurs, comme l’atmosphère est composée de molécules "massives", elle résiste mieux à l’évaporation. Mais ce ne sont que des hypothèses. Les chercheurs attendent désormais des résultats en provenance du James Webb pour les confirmer. "Le télescope spatial a d’ores et déjà réalisé des observations de LTT9779b par l’intermédiaire de son instrument NIRISS. Elles sont en cours de traitement. Elles devraient préciser la mesure de l’albédo. Et l’analyse du spectre infrarouge nous renseignera sur la composition de l’atmosphère en hydrogène et hélium. Nos modélisations de l’atmosphère, pour l’instant fondées uniquement sur la mesure de l’albédo de la planète, indiquent qu’elle devrait être pauvre en gaz légers. Nous imaginons d’ailleurs que c’est parce qu’ils ont été chassés de l’atmosphère que celle-ci s’est concentrée en éléments plus lourds. Le JWST nous permettra de confirmer ou d’infirmer cela." Les "merveilleux nuages" de LTT 9779 b devraient donc connaître d’autres développements très bientôt…