Une planète avalée par son étoile
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Un pourcentage non négligeable d'étoiles présentent des signatures spectrales indiquant qu'elles ont ingéré une planète au cours de leur vie. La plupart du temps dans les 100 premiers millions d'années après la formation de leur système planétaire, mais cet évènement peut être beaucoup plus tardif.
Une gloutonnerie cosmique. Quasi imperceptible : au moins une étoile sur 12 aurait un jour avalé une planète, révèle une étude, publiée dans la revue Nature, portant sur plus de 90 paires d'étoiles. Ces doublons stellaires ont été repérés grâce au satellite Gaia, de l'Agence spatiale européenne, et sont composés d'étoiles proches (éloignées de moins de 100 unités astronomiques) qui sont nées dans le même nuage moléculaire et possèdent donc la même composition chimique.
Fan Liu, de l'Université Monash, en Australie, accompagnée d'une équipe internationale, a recherché s'il était possible de déterminer si l'un des deux membres de ces paires d'étoiles avait pu ingérer une planète dans son passé. Un repas qui se traduirait par des différences dans le spectre de l'étoile et qui constitueraient, en quelque sorte, la signature chimique de la planète disparue. A l'aide du Very Large Telescope, du télescope Magellan et du télescope Keck, les astronomes ont alors évalué les données spectrales correspondant à 21 éléments et constaté qu'au moins 8% des étoiles gardaient la trace d'une ingestion planétaire.
"La plupart de ces étoiles ont un âge compris entre 1 et 10 milliards d'années. Certains travaux théoriques ont prédit que la signature de la planète ne pourrait survivre que pendant moins d'un milliard d'années. Mais dans notre étude, nous ne semblons pas voir de limite ou de tendance en fonction de l'âge des étoiles", explique à Sciences et Avenir Fan Liu. Ces évènements sont pensés être plus fréquents au cours des 100 premiers millions d'années de vie du système stellaire nouvellement formé, car il y règne alors une agitation chaotique à même de perturber les orbites des planètes naissantes jusqu'à les projeter vers leurs étoiles.
Des super-Terres comme repas principal
Mais, plus tard, des circonstances particulières telles qu'une migration planétaire tardive au sein du système, le passage d'une planète flottante dans le système ou un rapprochement avec une autre étoile peuvent briser l'équilibre du système et aboutir aux mêmes conséquences. En fait, peut-être même un peu plus souvent que prévu : "notre étude indique que les systèmes planétaires sont moins stables que ce que nous estimions après 100 millions d'années" souligne Fan Liu.
Selon les auteurs, les super-Terres sont les planètes les plus susceptibles d'être gobées par leurs étoiles. Ces astres dont la masse est comprise entre 1 et 10 fois celle de la Terre et qui sont composées de roches sont courantes dans les systèmes stellaires (en comparaison avec les Jupiter chaudes qui sont rares). "Et ces planètes sont plus sensibles aux instabilités qui peuvent survenir sur de longues périodes tandis que les planètes avec des masses plus élevées sont plus sensibles aux instabilités courtes qui se produisent quand les planètes sont plus proches les unes des autres" précise, à Sciences et Avenir, Bertram Bitsch de l'institut Max Planck pour l'Astronomie à Heidelberg, en Allemagne.
Le Soleil a-t-il avalé une planète ?
Or l'on ne peut que remarquer que dans notre propre système solaire, les super-Terres sont absentes. Est-ce à dire que le Soleil en aurait avalé une voire plusieurs ? "Il existe un article qui prétend qu'il aurait pu y avoir des super-Terres intérieures et que celles-ci auraient été projetées dans le Soleil par la migration de Jupiter. Cependant, cette théorie n’a jamais vraiment décollé, car les preuves chondritiques (liées à l'analyse des météorites, ndlr) indiquent que le système solaire interne n'avait pas assez de matériaux pour la formation de super-Terres", répond Bertram Bitsch.
Néanmoins, le Soleil présente tout de même certaines anomalies spectrales "mais ce n'est probablement pas en raison de l'ingestion d'une planète", confirme Fan Liu.