La crédibilité de Liz Truss menacée par les défis à venir
Dans son premier discours en tant que première ministre britannique, Liz Truss a annoncé mardi 6 septembre qu’elle entendait s’atteler à résoudre la crise énergétique qui menace le pays et les Britanniques.
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Après sa rencontre avec la reine Elizabeth II dans sa résidence écossaise de Balmoral, Liz Truss est devenue mardi 6 septembre la nouvelle première ministre britannique. La cinquante-sixième de l’histoire et la troisième femme. De retour à Londres, l’ex-cheffe de la diplomatie s’est dite résolue à « faire de nouveau fonctionner la Grande-Bretagne » et à faire « une nation d’aspiration ». Elle a promis des « baisses d’impôts et des réformes » pour faire croître l’économie. Des expressions tout droit sorties du guide du conservateur bon teint et du bon manageur d’entreprise.
Rien de neuf ou de surprenant de sa part. Lundi, suite à l’annonce de sa victoire contre son ancien collègue des finances Rishi Sunak, elle avait promis : « J’ai fait campagne comme une conservatrice et je gouvernerai comme une conservatrice. » Ses premières nominations ministérielles ont confirmé cette direction. Avec Kwasi Kwarteng aux finances, Suella Braverman à l’intérieur et James Cleverly aux affaires étrangères, l’aile ultralibérale du parti conservateur prend le pouvoir. Pour ce gouvernement très divers ethniquement, comme son prédécesseur, la réduction des impôts et de la taille de l’État l’emporte sur tout. Un vrai changement avec la politique plus modérée de Boris Johnson, qui avait placé l’accent sur les régions délaissées du Royaume-Uni.
Afin de concrétiser ces ambitions de long terme, Liz Truss devra auparavant résister « aux sévères vents mondiaux provoqués par l’effroyable guerre russe en Ukraine et les conséquences du Covid ». Sa priorité sera de « s’occuper de la crise énergétique ». Elle dévoilera cette semaine son plan pour s’assurer que « les gens ne se retrouveront pas avec des factures énergétiques inacceptables » et pour « protéger l’approvisionnement du pays ». Et pour cause : les tarifs de l’électricité et du gaz sont censés quasiment tripler à partir du 1er octobre. Il se murmure dans les médias britanniques qu’elle annulerait la hausse des tarifs, qui serait dès lors soit prise en charge par l’État, et donc par les contribuables, soit remboursable sur le long terme par les utilisateurs.
Sa crédibilité en jeu sur les prix de l’énergie
Ces détails importeront car la première ministre y jouera sa crédibilité. « Liz Truss est regardée d’un mauvais œil par les électeurs, explique Tim Bale, professeur de sciences politiques à l’université londonienne Queen Mary. Pour changer cette perception initiale, il lui faudra déployer une réponse à la hausse des prix de l’énergie qui montre qu’elle a compris la portée du problème et qu’elle est prête à aider les gens. »
Cette première série de mesures n’est pourtant que la première haie à passer pour la nouvelle première ministre. Son temps est compté. La prochaine élection générale aura lieu au plus tard dans deux ans, fin 2024. « Son sort dépendra au final de l’état de l’économie, poursuit Tim Bale. Le pays connaîtra-t-il une récession ? Quel sera le niveau de l’inflation ? Dans quel état sera le système de santé, en grande difficulté ? » La nouvelle dirigeante britannique n’a pas dit un mot dans son discours sur la réforme du NHS (National Health Service, système public de santé) qu’elle a pourtant promis de mener dans son programme.
Johnson en embuscade
La pression est d’autant plus intense sur les épaules de Liz Truss qu’en plus du Labour, le principal parti d’opposition, elle devra surveiller les siens. Et en particulier son prédécesseur. Dans son discours de départ mardi, donné à l’aube devant le 10, Downing Street lors des rares heures ensoleillées de la journée, Boris Johnson a apporté « son plus fervent soutien » au nouveau gouvernement. Mais il s’est aussi comparé à l’ancien consul Cincinnatus. Selon l’histoire mythifiée de cet ancien politicien romain, il fut tiré deux fois de son exil pour sauver une Rome en péril. À n’en pas douter, Boris Johnson se voit comme le futur chevalier blanc du parti conservateur.
Tristan de Bourbon