Naval Group. Quatre sous-marins vendus aux Pays-Bas : pourquoi le champagne va rester au frais
Le groupe français Naval Group a été choisi par les Pays-Bas pour la construction de quatre sous-marins, et ce au détriment d’un duo formé par le suédois Saab et le néerlandais Damen, ainsi que l’allemand TKMS.
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Les Pays-Bas ont annoncé vendredi 15 mars avoir choisi le Français Naval Group pour la construction de quatre sous-marins, un projet de plusieurs milliards d'euros, au détriment notamment du tandem formé par le Suédois Saab et le Néerlandais Damen.
« Après un processus de devis minutieux, Naval Group construira les nouveaux sous-marins », a déclaré le secrétaire d'État à la Défense, Christophe van der Maat, présent à Le Helder, dans le nord du pays, où se situe la plus grande base navale de la marine néerlandaise. « Ils ont réussi à proposer une offre équilibrée, polyvalente et réaliste. L'industrie néerlandaise a également un rôle important à jouer, condition importante dans le processus d'attribution », a-t-il ajouté. La compétition opposait le groupe public français Naval Group, allié au Néerlandais Royal IHC, à l'Allemand Thyssenkrupp Marine Systems (TKMS) et au Suédois Saab qui a fait alliance avec le constructeur naval néerlandais Damen.
Ce long processus entamé en 2015 vise à remplacer les quatre sous-marins de classe Walrus lancés au début des années 1990 et dont le premier a été retiré du service à l'automne dernier pour que ses pièces puissent servir à l'entretien des autres. « Équipés des derniers systèmes et technologies, les nouveaux sous-marins sont un digne successeur de la classe Walrus », a déclaré dans un communiqué le ministère néerlandais de la Défense. « Les nouveaux sous-marins constituent une étape importante dans le renforcement de notre sécurité », a affirmé sur X Kajsa Ollongren, ministre de la Défense.
« Des trois offres qui étaient proposées très clairement, celles qui avaient les capacités les plus importantes, les plus gros sous-marins, ceux avec le plus d'armement, ceux qui pouvaient aller plus loin, c'étaient les Français », analyse Vincent Groizeleau, rédacteur en chef de Mer & Marine, pour RFI. « Tout le monde a quand même bien vu que ces sous-marins étaient excellentissimes. Il y a aussi une confiance dans un produit qui maintenant, commence à être éprouvé. »
Un contrat d'environ 4 à 6 milliards d'euros
La Haye n'a pas mentionné le prix du contrat, mais selon les médias locaux, il pourrait s'élever entre 4 et 6 milliards d'euros. Celui-ci comprendra également un accord de coopération industrielle (ICA), visant « à renforcer la base technologique et industrielle de défense néerlandaise », selon le ministère, même si l'assemblage des sous-marins sera réalisé dans le chantier naval de l'entreprise retenue.
Les deux premiers sous-marins doivent entrer en service dans les dix ans suivant la signature du contrat, selon le ministère de la Défense. La victoire de Naval Group marque le premier succès à l'export de son sous-marin Barracuda, dont 12 exemplaires avaient été vendus à l'Australie avant que Canberra n'annule le contrat au profit du partenariat Aukus avec Londres et Washington, déclenchant au passage une crise diplomatique.
Un premier Barracuda, le Suffren, équipe la Marine française dans une version à propulsion nucléaire. Le modèle destiné aux Pays-Bas est lui à propulsion conventionnelle diesel-électrique et un peu plus petit, 3 000 tonnes contre 4 500 tonnes. La marine néerlandaise a fait part de son besoin d'être dotée de sous-marins océaniques de grande autonomie, ce pour quoi le Barracuda a été conçu. « Les Néerlandais veulent des bâtiments qui ont de très fortes capacités vu le contexte géostratégique actuel, c'est-à-dire des bateaux capables d'aller très loin, notamment pour aller patrouiller en Atlantique jusque dans leurs possessions, au niveau des Antilles et ailleurs », explique Vincent Groizeleau qui ajoute qu'ils souhaitent « avoir des bateaux vraiment de premier rang avec de fortes capacités militaires, y compris peut-être, la capacité à mettre en œuvre des missiles de croisière de manière aussi à porter des capacités importantes au niveau de l'Otan ».
Des remous à l'Assemblée néerlandaise
L'annonce de La Haye officialise une information qui circulait déjà dans la presse ces derniers jours. La possible sélection du groupe public français avait provoqué des remous au sein du Parlement néerlandais qui sera appelé à entériner le choix du gouvernement avant toute signature de contrat.
Le cabinet du Premier ministre Mark Rutte expédie les affaires courantes depuis les élections de novembre qui ont vu la victoire du dirigeant d'extrême droite islamophobe Geert Wilders. Mais dans le système politique néerlandais très fragmenté, où aucun parti n'est assez fort pour gouverner seul, Geert Wilders a dû renoncer à devenir Premier ministre au profit d'un gouvernement partiellement technocrate qui reste à constituer.
Mercredi soir 13 mars lors d'un débat devant la chambre basse, le député Chris Stoffer du parti réformé SGP – avec une forte base en Zélande, où est basé Damen – a appelé à « ne pas laisser ce gouvernement décider, mais un nouveau gouvernement qui choisit dans l'intérêt des Pays-Bas ». Mais l'industrie néerlandaise a bel et bien un rôle à jouer, non seulement dans la construction des nouveaux sous-marins, mais aussi dans la maintenance, s'est défendu le secrétaire d'État vendredi. « Cette décision est donc non seulement bonne pour la marine et nos intérêts en matière de sécurité, mais certainement aussi pour les entreprises néerlandaises et le développement de notre savoir-faire », a-t-il expliqué.