La rupture des relations entre les États-Unis et l’Arabie saoudite
Les relations entre Washington et Riyad sont proches du «point de rupture» en raison des désaccords sur la production de pétrole, les enjeux de sécurité et l’invasion de l’Ukraine.
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Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a rencontré pour la première fois en septembre l’actuel conseiller à la sécurité nationale des États-Unis, Jake Sullivan. Le prince héritier aurait crié après Sullivan alors qu’il parlait du meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. Le prince aurait par la suite dit à Sullivan qu’il ne voulait plus jamais discuter de la question. Bin Salman aurait également dit à Sullivan que les États-Unis devraient également oublier que l’Arabie saoudite augmenterait la production de pétrole à la demande des États-Unis. C’est ce qu’il rapporte le journal Wall Street (WSJ) mardi.
Des initiés à Washington et à Riyad qui se sont entretenus avec le journal ont imputé que les relations entre les États-Unis et l’Arabie saoudite qui remontaient à 1945 n’avaient jamais été aussi mauvaises.
En 2019, Joe Biden a affirmé que le royaume devait être traité en paria à cause de son mépris des droits de l’homme.
Et les tensions se sont amplifiées depuis que la Russie a envahi l’Ukraine. Le Royaume a refusé les demandes américaines d’augmenter la production de pétrole afin de faire baisser le prix mondial.
Un responsable de l’ambassade d’Arabie saoudite a ajouté qu’au cours des 77 dernières années, les États-Unis et le Royaume ont eu « beaucoup de désaccords et de points de vue divergents sur de nombreuses questions, mais cela n’a jamais empêché les deux pays de trouver un moyen de travailler ensemble. »
Ce que veut MBS, plus que tout, c’est être reconnu comme le dirigeant de facto de l’Arabie saoudite et son futur roi, cela lui donnerait l’immunité contre les poursuites pour le meurtre en 2018 du dissident Jamal Khashoggi. Il demande davantage d’appui à leur intervention dans la guerre au Yémen, plus l’aide pour développer leur programme nucléaire à l’heure où celui de l’Iran, son rival dans la région, progresse.
En juillet dernier, le prince Khalid bin Salman a écourté son voyage à Washington lorsque sa demande de défenses aériennes supplémentaires n’a abouti à rien. Les États-Unis avaient retiré plusieurs systèmes anti-missiles Patriot d’Arabie saoudite le mois précédent, invoquant des besoins de maintenance. Pendant ce temps, les rebelles houthis ont multiplié les frappes de missiles et de drones contre le Royaume et les Émirats arabes unis, cherchant à forcer la fin de leur implication au Yémen. L’une des premières actions de l’administration Biden a été de révoquer la désignation des Houthis comme terroristes, faite par le Département d’État sous Trump.
Depuis lors, Riyad a annulé les visites prévues du secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin et du secrétaire d’État Antony Blinken. MBS aurait également refusé de participer à l’appel du 9 février avec Biden et son père, le roi Salman.
Les Saoudiens ware « consterné » lors du retrait américain d’Afghanistan en août dernier, désapprouvent les efforts visant à relancer l’accord nucléaire avec l’Iran, et « poil » à la présomption de Washington qu’ils suivront tout ce que les États-Unis décideront, selon le WSJ.
Selon des responsables saoudiens, le risque pour les Etats-Unis est qu’un rapprochement entre l’Arabie saoudite, la Chine et la Russie s’opère ou, a minima, que le royaume opte (comme il le fait au sujet de l’Ukraine) pour la neutralité sur des questions cruciales pour Washington.
Le partenariat américano-saoudien repose sur l’idée que l’armée américaine défendra le royaume s’il devait être attaqué par des puissances hostiles, en échange de quoi ce dernier s’engage à assurer un flux constant de pétrole aux marchés mondiaux. Les dirigeants saoudiens ont tenu parole et, à quelques exceptions près, l’approvisionnement en brut à prix raisonnable a fonctionné. Sauf que les variables économiques sous-jacentes ont évolué : l’Arabie saoudite ne vend plus l’essentiel de sa production aux Américains, mais aux Chinois, ce qui déplace ses intérêts commerciaux et politiques.
La Maison Blanche a cessé de demander à Riyad d’extraire plus de pétrole et préfère simplement demander aux Saoudiens de ne rien faire qui risque de miner les efforts occidentaux en Ukraine
Le WSJ commente qu’un nouveau rapprochement avec l’Arabie saoudite ne sera pas facile. Biden fait face à une opposition farouche, qui a déjà appelé l’administration américaine à réévaluer les relations américano-saoudiennes compte tenu de la position troublée actuelle de l’Arabie saoudite sur la politique intérieure et étrangère. De son côté, le prince héritier saoudien ben Salmane s’est jusqu’à présent montré peu enclin à se retirer de l’alliance lucrative avec Moscou sur le contrôle de la production pétrolière sur le marché mondial.