« Depuis l’annonce des autorités, c’est le souk dans les ports indiens ! », confie un négociant. Plus personne ne sait si les bateaux peuvent être chargés ni s’ils peuvent partir. Instruction a été donnée pour autoriser jusqu’au 15 septembre les chargements déjà programmés, mais les ordres ministériels restent visiblement flous pour ce qui est des détails.
Or une chose est sûre, le riz déjà arrivé au port est vendu, et ne peut pas retourner chez le producteur. Il y a de grandes chances donc qu’il puisse partir dans les prochains jours, confie notre interlocuteur, qui attend la fin de semaine pour y voir lui-même plus clair.
Légère hausse des riz vietnamiens et thaïlandais
Pour l’heure, la décision indienne a fait monter les prix de 10 à 15 dollars, notamment en Thaïlande et au Vietnam, les deux autres exportateurs qui comptent derrière le numéro un indien. Deux pays qui avaient été contraints ces derniers mois de s’aligner sur les prix bon marché de l’Inde. Si certains se frottent les mains, voire essaient spéculer, pour l’heure manifestement le marché n’a pas paniqué.
Les achats continuaient ce lundi et la paralysie annoncée des transactions n’était hier pas encore d’actualité. Peut-être parce que les stocks sont bons. « Il y a du riz partout », disent à l’unisson les économistes de la filière. Même en Afrique ! Que ce soit au Sénégal, gros client de la brisure indienne ou en Côte d'Ivoire, les réserves sont de cinq à six mois. Sans compter les bateaux qui sont déjà sur l’eau et ceux qui sont en attente de débarquement dans les ports africains.
La pression sur l’Inde va vite monter
La décision indienne intervient également à l’heure où la nouvelle récolte asiatique commence. Un calendrier qui plaide pour hausse modérée des cours. Car pour faire place aux nouveaux grains, les entrepôts devront inévitablement se vider d’une manière ou d’une autre. « Dans le secteur du riz, les restrictions à l’exportation sont vite mises sous pression dans le secteur du riz et c’est ce qui fait que les crises ne sont jamais très longues », explique Patricio Mendez del Villar, économiste au Cirad et spécialiste des filières rizicoles. En 2007, l’Inde avait interdit les exportations pour trois ans, mais le contexte était très différent.
Si le marché est aujourd’hui suspendu à la stratégie d’exportation indienne, d’autres facteurs seront aussi importants pour déterminer les prix de demain. L’état des récoltes asiatiques qui débute sera un élément clé pour connaître la structure des prix jusqu’en juin 2023, « car c’est le gros de l’offre mondiale qui arrive sur le marché », explique l’expert du Cirad. L’autre paramètre est l’appétit chinois pour les brisures de riz, qui a été immense cette année.
RFI