Les économies d’énergie méprisées par les politiques
«Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer» Guillaume D'Orange
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L’Allemagne, le plus grand consommateur européen, mais aussi le plus dépendant du gaz russe, a été le premier pays à mettre en place des incitations pour alléger la consommation. Avec des trains bon marché pour éviter la voiture et des initiatives de l'administration fédérale pour donner le bon exemple. Dans les bureaux des services publics, le climatiseur se déclenche à 26 °C au lieu de 22 °C. Le Danemark, qui importe du gaz russe via l'Allemagne, est lui aussi en train de s’y mettre. Tout comme l'Espagne ou le Japon.
Cet été, les compagnies nippones vont même récompenser les ménages les plus vertueux en leur allouant des points pour alléger leur facture. En matière d'économie d'énergie, les pays occidentaux savent faire. Ils l’ont démontré après le choc pétrolier de 1973. Plus récemment, après le tsunami de Fukushima en 2011 et la mise à l’arrêt de la majeure partie du parc nucléaire, le Japon a réussi à éviter la grande panne en diminuant sa consommation de 15%.
L'objectif de ces restrictions est de garantir l'approvisionnement pour l’hiver
La grande crainte : que la Russie coupe le robinet du gaz à l'Europe. D'après Berlin, cette rupture pourrait intervenir dès le 11 juillet à la faveur d’une opération de maintenance sur le gazoduc Nordstream. Dépenser moins d'énergie dans ce contexte, c'est gérer la pénurie. Se projeter dans une économie de guerre en choisissant de renoncer au superflu pour éviter les rationnements qui menacent. Ces mesures provisoires et exceptionnelles peuvent être bien acceptées et comprises parce qu'elles servent aussi la cause du pouvoir d'achat.
C’est le premier pas vers la sobriété, mais ce n'est pas encore en soi un changement de modèle. L'Europe a pris l'engagement de réduire sa consommation de 10% d'ici 2030 par rapport à l'année 2020. C'est une rupture qui nécessite des investissements sur le long terme et une communication claire sur les changements de comportement qu'implique la sobriété énergétique.
Les entreprises se préparent-elles à ce changement de paradigme ?
Certaines entreprises sont à l'avant-garde de ce processus et revoient déjà leur fonctionnement pour dépenser moins d'énergie. Mais cela va au-delà de la mesure d'économie. Elles doivent réfléchir à ce qu'elles produisent, s'inscrire dans l'économie circulaire du recyclage, penser relocalisation. Cette révolution à accomplir n'est pas toujours compatible avec les règles en vigueur de notre économie de marché. Un investissement doit être amorti sur dix ans maximum selon les normes comptables.
Or, pour passer à la sobriété, il faut plutôt tabler sur 15 ans d'amortissement. C'est pourquoi les entreprises demandent aujourd'hui que ces nouvelles exigences écologiques soient mieux prises en compte. En France, 84 chefs d'entreprise ont publié une tribune commune ce week-end pour passer « d'une sobriété énergétique d'urgence à une sobriété organisée ». Pour le moment, le gouvernement français en est au stade des consultations. Un groupe de travail réunissant public et entreprises privées a été lancé la semaine dernière.
Du côté du grand public, la priorité est donnée à la défense du pouvoir d'achat
Il n'est même pas question de faire des économies d'énergie. Difficile d'expliquer aux Français qu'ils doivent dépenser moins de carburant quand ils s'apprêtent à prendre leur voiture ou l'avion pour partir en vacances. On est donc encore très loin des exigences de la sobriété énergétique et de la définition des moyens pour y parvenir.
Parmi les pistes évoquées, on pense à des logements plus petits donc plus faciles à chauffer, ou à des limitations de vitesse sur la route. Ces choix ou d'autres bouleverseront radicalement le quotidien des ménages. Ils nécessiteront beaucoup de pédagogie pour éviter le rejet. Tout le monde a encore en mémoire le mouvement des gilets jaunes en réaction à la taxe écologique sur les carburants.