L'émouvant adieu de Roger Federer au tennis mondial
Avec 103 titres sur le circuit ATP, dont 20 en Grand Chelem, 310 semaines en tête du classement, dont 237 d'affilée lors de sa plus longue période de règne, l'empreinte du "roi" Federer sur le tennis n'est pas près de s'estomper.
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Un immense frisson avait parcouru la O2 Arena et ses quelques 17.000 spectateurs au moment de sa dernière entrée sur un court en tant que tennisman professionnel. C'est sous les applaudissements et les larmes -- les siennes, celles de sa famille, de ses amis, de ses admirateurs, et même de Rafael Nadal -- qu'il l'a quitté.
"C'est des visages et de l'émotion dont je me rappellerai" dans plusieurs années, en pensant à cette soirée, a d'ailleurs confié le Suisse après le match perdu face aux Américains Jack Sock et Frances Tiafoe.
En délicatesse avec son genou droit depuis trop longtemps et face à l'absence de progrès suffisants révélée par un scanner il y a quelques semaines, il avait fini par annoncer il y a huit jours son départ irrévocable.
Il avait choisi la Laver Cup, un match par équipe entre l'Europe et le Reste du Monde, qu'il a contribué à créer, à Londres, une ville témoin de certains de ses plus grands exploits à Wimbledon ou aux Masters, pour tirer sa révérence.
"J'ai songé à le faire il y a un mois, mais j'ai juste pensé que, si je devais le faire, c'était ici", a-t-il expliqué.
Après presque un an et demi sans jouer, il s'est "contenté" d'un double, exercice où sa qualité de service, son toucher et son coup d'oeil font encore merveille.
Cela lui a permis aussi de s'entourer d'une équipe, et quelle équipe ! Il avait à ses côtés Nadal, son partenaire d'un soir, mais aussi Novak Djokovic et Andy Murray, deux joueurs de sa génération et qu'il a vu progresser jusqu'à contester sa supériorité et même le dépasser, ainsi que la relève, incarnée par Casper Ruud, Stefanos Tsitsipas et Matteo Berrettini, qui le remplacera pour la suite de la Laver Cup.
"Juste un moment dans ma vie"
La présence sur le banc de Björn Borg, comme capitaine, ainsi que celles de John McEnroe sur celui du Reste du Monde et de Rod Laver, premier joueur à avoir remporté deux fois les quatre Grand Chelems sur une année civile et à qui la compétition rend hommage, ne dépareillait dans cette fête du tennis.
La formule de la Laver Cup, qui permet à toute l'équipe d'approcher les joueurs aux changements de côté pour prodiguer conseils ou encouragements, a donné une ambiance très conviviale.
Et si le match en lui-même a parfois eu des airs d'exhibition, ne pas le jouer à fond aurait presque été un crime de lèse-majesté.
"On va profiter du moment mais on ne retiendra pas nos coups, désolé Roger", avait prévenu Sock avant le match.
Malgré quelques limites, Federer a répondu présent. C'est sur une volée de coup droit gagnante qu'il a offert aux siens la balle de premier set, remportée sur un de ses passings que Sock n'a pas su retourner (6-4), pour le plus grand plaisir du public.
"Honnêtement, j'ai été surpris de pouvoir si bien jouer ce soir, et j'en ai juste profité. Cela a été génial du début à la fin", a-t-il assuré.
Le deuxième set, perdu au tie-break (7-2), a offert un épilogue dramatique avec un chassé-croisé intense pendant le super tie-break final.
Federer a même servi pour le match à 9-8, mais ce sont finalement les Américains qui ont un peu gâché la fête en gagnant finalement 4-6, 7-6 (7/2), 11-9.
En regard de la carrière incroyable et de l'importance qu'il aura eu dans l'évolution de ce sport au XXIe siècle, cette défaite sera une péripétie et lui-même s'est dit prêt à sa nouvelle vie qui a commencé dans la nuit londonienne.
"La partie qui me faisait le plus peur, c'était de parler au micro (...) parce que je sais à quel point je deviens impossible quand je suis trop ému", a-t-il avoué.
"Mais j'ai réussi à garder en tête (...) à quel point la journée avait été merveilleuse, que ce n'était pas la fin, que la vie continue, je suis en bonne santé, heureux, tout va bien, c'est juste un moment dans ma vie", a-t-il ajouté, modeste, face à une journée historique pour le tennis et même le sport.
Un hommage vibrant à sa femme
"Cela a été une journée merveilleuse, je l'ai dit aux gars, je suis heureux, je ne suis pas triste, c'est merveilleux d'être ici", a-t-il assuré, malgré des yeux déjà brillants.
"Je n'ai pas tellement été stressé", a-t-il assuré, même si, après un an et demi sans jouer et avec un genou droit qui l'a contraint à cette retraite, à 41 ans, il craignait "un pépin au mollet ou un dos bloqué pendant le match, donc je suis vraiment content de l'avoir fini", malgré la défaite 6-4, 6-7 (2/7), 9-11, en double avec son rival et ami Rafael Nadal, contre les Américains Jack Sock et Frances Tiafoe, pour la Laver Cup, match annuel qui oppose Europe et Reste du Monde, qu'il a contribué à créer.
Se penchant sur son parcours exceptionnel, il a assuré qu'il le "recommencerait sans rien y changer".
"Cela n'aurait jamais dû être comme ça, j'aimais juste jouer au tennis et passer du temps avec mes amis. Je n'aurais jamais pensé que ça se terminerait ici, ça a été un parcours parfait".
Le plus dur pour lui a été d'évoquer sa famille présente dans les tribunes.
"On doit vraiment en passer par là?", a-t-il demandé, avant de se raviser, "non, ça va, je m'en tire pas trop mal jusqu'ici, j'ai l'impression, au moins j'arrive à parler. Dans mes visions, je n'arrivais même pas à parler", a-t-il plaisanté.
Il a notamment rendu hommage à son épouse, Mirka, rencontrée il y a 22 ans, qui l'a "tellement soutenu".
"Elle aurait pu m'arrêter il y a bien, bien longtemps. Mais elle ne l'a pas fait, elle m'a laissé continuer et m'a permis de continuer, c'était incroyable, merci", a-t-il réussi à glisser avant d'être submergé par les sanglots.