Ariane 5 entre dans le « money time ». Ce mardi soir, le lanceur lourd européen doit décoller de Kourou, à 21h30, heure de Paris, pour sa 115e mission, l'antépénultième de sa carrière débutée en 1996 et qui s'achèvera en 2023, avec le lancement de ses deux derniers exemplaires.
Pour son troisième vol de l'année 2022, la fusée emporte le premier opus d'une toute nouvelle génération de satellite météo, développée depuis 2010 sous la direction de la branche française de Thales Alenia Space. MTG-1 (pour « Meteosat Third Generation ») doit offrir de nouvelles capacités à Eutmetsat, l'organisation météorologique européenne en charge des prévisions par satellite.
Il est ainsi conçu pour fournir des données toutes les dix minutes, contre quinze avec la génération précédente, lancée entre 2002 et 2015. Dans quelques mois, il sera suivi d'un autre satellite sondeur, capable de retranscrire la composition de l'atmosphère (température, humidité, etc.)
L'acquisition de ces données doit permettre de mieux analyser les phénomènes convectifs, à l'origine des orages et tempêtes, mais aussi d'étudier les feux de forêt, le brouillard ou la qualité de l'air par la détection des particules polluantes.
La famille sera complétée, en 2025, par MTG-I2, qui se concentrera sur l'Europe à raison d'un scan toutes les deux minutes trente, puis de trois autres satellites similaires, en cours de construction. Au total, les six engins auront coûté 4,3 milliards d'euros.
En France, les données brutes seront récupérées en temps réel et analysées au sein du Centre de météorologie spatiale (CMS) de Météo France de Lannion (Côtes-d'Armor). Une fois converties en images puis en cartes, fixes ou animées, celles-ci sont transmises aux prévisionnistes.
50 fois plus de données brutes
« Aujourd'hui, on reçoit 330 giga-octets de données brutes par jour. Avec la nouvelle génération, ça va être multiplié par 50 », a détaillé auprès de l'AFP Sylvain Le Moal, l'un des responsables du CMS. « Plus on a de données, meilleures seront les prévisions, a-t-il poursuivi. Et là ce sont des millions en plus auxquelles on aura accès. »
Pour lui, ces nouveaux instruments permettront aussi une « visualisation plus précise de certains types de nuages plus fins, comme ceux se formant à l'arrière des avions, qui peuvent influencer le réchauffement climatique et dont on ne sait pas grand-chose aujourd'hui ».
« On aura également davantage d'informations sur les températures de surfaces de la mer, ce qui permettra de mieux voir des phénomènes comme les remontées d'eau froide ou chaude, l'un des facteurs aggravants des orages », ajoute-t-il, soulignant que « sonder l'atmosphère permettra à terme de mieux comprendre les phénomènes dangereux ».
Sylvain Le Moal rappelle toutefois qu'un satellite « reste un instrument d'observation », et que, malgré un gain de temps et de précision apporté par cette nouvelle génération, « on restera sur une prévision de risque de survenue ». « Impossible de savoir où et quand exactement cela va tomber, en raison du caractère fortement instable et explosif de ces événements », conclut-il.
Les Echos