Guerre Israël-Gaza: critiquée au Parlement européen, Ursula von der Leyen tente de corriger le tir
La pression politique est montée d’un cran ce week-end sur la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui a longtemps rechigné à exhorter publiquement l’État hébreu à respecter le droit international dans sa contre-offensive à Gaza.
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Dans une lettre à la Commission publiée mardi, des eurodéputés demandent le départ du représentant hongrois au sein du collège des commissaires, Oliver Varhelyi.
C’est peu dire qu’ils sont remontés. Dans une lettre mardi 17 octobre adressée à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, 72 eurodéputés demandent « la démission d’Oliver Varhelyi, commissaire européen pour le voisinage et l’élargissement ». Une demande aussi claire est rare au niveau européen, surtout qu’elle est partagée de manière transpartisane de la gauche radicale aux libéraux.
Suspension des paiements pour l’aide aux Palestiniens
La cause du courroux des eurodéputés ? Le commissaire hongrois Oliver Varhelyi a annoncé la semaine dernière, sans prévenir qui que ce soit mais par un tweet sur le réseau social X, une suspension des paiements pour l’aide aux Palestiniens dans les jours qui ont suivi l’attaque sans précédent lancée par le Hamas contre Israël. Une aide aux Palestiniens dont l’UE est le principal pourvoyeur.
Devant le tollé, l’exécutif européen a tenté de rectifier le tir, en indiquant qu’un « réexamen urgent » de l’aide au développement était en cours et que l’aide humanitaire n’était pas concernée. Au final, Ursula von der Leyen a annoncé samedi 14 octobre un triplement de cette aide humanitaire à 75 millions d’euros. Un manque de cohérence qui a valu de nombreuses critiques à l’exécutif européen.
« Une faute politique »
« Une faute politique et institutionnelle grave », résume Mounir Satouri, eurodéputé écologiste français (groupe Les Verts) à la manœuvre derrière la lettre commune des 72 eurodéputés. « Depuis quand un commissaire annonce une telle décision par un tweet, avant même une réunion du collège des commissaires ? », s’indigne-t-il.
Un constat partagé par son collègue social-démocrate Raphaël Glucksmann. L’élu de Place publique (groupe S & D) tempête sur ce commissaire placé par le Premier ministre populiste de la Hongrie, Viktor Orban. « Comment a-t-on été assez stupide pour donner ce portefeuille si sensible de l’Élargissement à Orban ? Varhelyi défend la politique de son Premier ministre alors qu’il est censé défendre intérêt général européen. »
Le commissaire Varhelyi a fait polémique plusieurs fois durant son mandat. Comme lorsqu’un micro mal fermé dans l’hémicycle du Parlement européen avait fait entendre qu’ils considéraient des eurodéputés comme des « idiots » lors d’une séance d’échanges avec la Commission.
Dans le groupe libéral Renew Europe (où siègent les élus macronistes) aussi, beaucoup de membres souhaitent sa démission et trouve son attitude inacceptable. « Les cafouillages au niveau européen de ces dernières semaines doivent cesser », a ainsi déclaré Stéphane Séjourné, eurodéputé français Renaissance qui dirige Renew Europe.
« Il n’est pas acceptable de laisser entendre que l’UE financerait le terrorisme alors que les fonds accordés à la Palestine, via les Nations Unies (UNRWA) ou l’Autorité Palestinienne sont parmi les plus scrutés », déclare Mounir Satouri.
Une vision qui n’est pas partagée par l’extrême droite. Le chef de file de la délégation RN au Parlement européen, Jean-Paul Garraud, a affirmé son soutien au commissaire Oliver Varhelyi, estimant que « ce qu’il a dit est ce qu’il faut faire ».
Peu de chance de voir leur demande aboutir
Mais les députés signataires de la lettre font face à un double défi pour faire tomber le commissaire hongrois. Tout d’abord, ils sont bloqués par les traités européens qui leur donnent certes le pouvoir de faire tomber toute la Commission avec une motion de censure, mais pas celui de retirer leur confiance à un seul commissaire. Cela avait déjà été le cas pour la Commission Santer (1995-1999) où l’ex-Première ministre française Édith Cresson, soupçonnée de mauvaise gestion, a fait tomber l’ensemble de l’exécutif européen avec elle.
Autre problème : il ne reste que quelques mois avant les élections européennes. Dur de mobiliser l’ensemble du Parlement européen pour faire pression sur Ursula von der Leyen alors qu’il reste peu de temps pour adopter les très nombreux textes encore en cours de vote.
Au mieux donc, les eurodéputés pourraient obtenir une nouvelle répartition des portefeuilles au sein de la Commission pour retirer le maximum de sujets sur lesquels pourrait intervenir Oliver Varhelyi.