Les départs se multipliaient chez Twitter jeudi 17 novembre, au lendemain d'un ultimatum d'Elon Musk, qui a demandé aux employés rescapés de la première vague de licenciements de choisir entre se donner «à fond, inconditionnellement», ou partir («Commit to a new “hardcore” Twitter or leave»). «Je suis peut-être exceptionnelle, mais (...) je ne suis pas inconditionnelle» («hardcore»), a par exemple tweeté Andrea Horst, dont le profil LinkedIn affiche encore «Responsable de la chaîne d'approvisionnement (survivante) chez Twitter». Elle a ajouté le hashtag «#lovewhereyouworked», c'est-à-dire «Aime l'endroit où tu as travaillé», comme de nombreux autres salariés annonçant leur choix. La biographie du profil Twitter de plusieurs ingénieurs partants jeudi les décrivait comme «ingénieurs softcore» ou «ex-ingénieurs hardcore», dans un pied de nez à leur nouveau patron. Une équipe au complet aurait décidé de sauter le pas ensemble et de quitter l'entreprise, a déclaré à Reuters un employé sur le départ. Elon Musk aurait selon plusieurs sources eu une réunion avec certains de ses ingénieurs pour tenter de les convaincre de rester, en vain.
Les chiffres de cette nouvelle vague de départ ne sont pas encore connus. Reuters les estime à plusieurs centaines. Dans un sondage sur l'application de travail Blind, qui authentifie les employés via leur adresse e-mail professionnelle et leur permet de partager des informations de manière anonyme, 42 % des 180 personnes interrogées ont choisi la réponse «Prendre l'option de sortie, je suis libre!» Un quart déclare avoir choisi de rester «à contrecœur», et seulement 7 % des sondés déclarent avoir «cliqué sur oui pour rester, je suis un inconditionnel». Dans une conversation privée sur Signal avec environ 50 membres du personnel de Twitter, près de 40 ont déclaré avoir décidé de partir, selon un ancien employé. Et dans un groupe privé Slack pour les employés actuels et anciens de Twitter, environ 360 personnes ont rejoint un nouveau canal intitulé «licenciement volontaire». Un sondage distinct sur Blind a demandé aux membres du personnel d'estimer le pourcentage de personnes qui quitteraient Twitter en fonction de leur perception. Plus de la moitié des répondants ont estimé qu'au moins 50 % des employés partiraient.
Des cœurs bleus et des émojis de salut ont inondé Twitter jeudi, la deuxième fois en deux semaines alors que des employés du réseau à l'oiseau bleu faisaient leurs adieux. Vers 18 heures (heure de la côte Est), plus de deux douzaines d'employés à travers les États-Unis et l'Europe avaient annoncé leurs départs dans des publications sur Twitter examinées par Reuters, bien que chacune de ces démissions n'a pu être vérifiée de manière indépendante.
Si ça casse, il ne reste plus personne pour faire les réparations dans de nombreux domaines. »
Un employé anonyme
D'après Zoë Schiffer, journaliste du média spécialisé Platformer, Twitter a prévenu jeudi après-midi tous les employés que les bureaux de San Francisco, en Californie, étaient temporairement fermés et inaccessibles, même avec un badge. Selon une source interne, les agents de sécurité auraient commencé à expulser les employés du bureau dès jeudi soir. Le réseau social, qui a perdu de nombreux membres de son équipe de communication, n'a pas répondu à une demande de commentaire de l'agence Reuters. La vague de nouveaux départs inclurait de nombreux ingénieurs chargés de corriger les bogues et de prévenir les interruptions de service, soulevant des questions sur la stabilité de la plateforme dans les prochains jours. Jeudi soir, la version de l'application Twitter utilisée par les salariés aurait commencé à ralentir, selon une source proche du dossier, qui a estimé que la version publique de Twitter risquait de ne pas tenir la nuit. «Si ça casse, il ne reste plus personne pour faire les réparations dans de nombreux domaines», a déclaré cette personne, qui a refusé d'être nommée par crainte de représailles. Le hashtag #RIPTwitter était en tête des tendances dans le nuit de jeudi à vendredi.
Mercredi, Elon Musk, propriétaire et patron de Twitter depuis trois semaines, avait demandé individuellement aux employés du réseau social de s'engager à «travailler de longues heures à haute intensité», «pour bâtir un Twitter 2.0 révolutionnaire et réussir dans un monde de plus en plus concurrentiel». «Seule une performance exceptionnelle vaudra une note suffisante», a-t-il précisé dans ce courrier interne consulté par l'AFP. Les salariés avaient jusqu'à jeudi après-midi pour cliquer sur la case «oui», sous peine de devoir quitter Twitter avec une indemnité correspondant à trois mois de salaire. Une méthode qui détonne même au États-Unis, où le droit du travail est moins protecteur des salariés que dans beaucoup de pays développés.