Assurance-chômage : comment fonctionne l’indemnisation chez nos voisins européens ?
LE SCAN ÉCO/CONTENU INTERACTIF - La Cour des comptes juge le système français de l'assurance chômage «très généreux». Comment la France se situe par rapport à ses voisins européens ? Comparatif des montants, durées et conditions d'obtention des allocations chômage dans 10 pays.
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À peine la dernière réforme de l’assurance chômage sur le point d’entrer en vigueur, le Premier ministre Gabriel Attal en annonce une nouvelle avec une réduction de la durée d’indemnité qui pourrait passer de dix-huit à douze mois. Pour cette nouvelle réforme voulue par Gabriel Attal, « une des pistes, c'est de réduire cette durée d'indemnisation de plusieurs mois » mais « je ne pense pas qu'il faille que ça aille en dessous de douze mois », a déclaré mercredi le Premier ministre sur TF1. En ligne de mire, le gouvernement se trouve face à un besoin urgent de faire des économies alors que le déficit budgétaire a dérapé à 5,5% du PIB en 2023.
« Nous gardons une durée d'indemnisation la plus longue parmi les pays développés : dix-huit mois. La responsabilité des partenaires sociaux, ce sont les salariés. La responsabilité de l'État, ce sont tous ceux qui sont au chômage. Pour ma part, je considère que l'État devrait reprendre la main sur l'assurance chômage de manière définitive », déclarait le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, le 18 mars dernier. Une façon à peine voilée de sous-entendre que la France a l’un des systèmes d’indemnisation chômage les plus généreux d’Europe, ce qui est pourtant loin d’être aussi simple.
La France est, en tout cas, loin d'avoir la durée d’indemnisation la plus longue d'Europe. Excepté pour les chômeurs de plus de 55 ans qui sont indemnisés jusqu’à vingt-sept mois, la durée maximale d’indemnisation est désormais de dix-huit mois en France. C’est plus qu’en Allemagne où elle est de douze mois, ou au Royaume-Uni où elle est de six mois, mais c’est aussi moins que le Danemark, l’Italie ou l’Espagne où la durée d’indemnisation peut atteindre vingt-quatre mois. La Belgique remporte, quant à elle, la palme avec une durée d’indemnisation en théorie quasi illimitée, puisque qu’après le versement d'une indemnisation dégressive pendant quarante-huit mois, le demandeur d’emploi perçoit une indemnité forfaitaire de 1 355 euros par mois.
En France, un taux d'indemnisation assez faible, mais non dégressif
La France est également loin d’être le pays qui indemnise le mieux ses demandeurs d’emploi, mais elle leur garantit cependant des revenus stables sur toute leur période de chômage, car le taux d'indemnisation est non dégressif. L’assurance chômage française assure à chacun de ses bénéficiaires 57% de son salaire journalier de référence, ce qui est nettement inférieur à ce qui est pratiqué au Danemark avec un taux de 90%, au Luxembourg avec 80% du salaire de référence brut, en Suisse avec 70% ou 80% ou aux Pays-Bas avec 75%, mais aussi de l’Allemagne qui garantit à ses demandeurs d’emploi 60% à 67% de leur revenu de référence en fonction de leur situation familiale.
D’autres pays ont, en revanche, choisit d’indemniser leurs demandeurs d’emploi de façon dégressive. Une piste que le Premier ministre, Gabriel Attal, a affirmé avoir étudié sans pour autant la privilégier dans sa future réforme. L’Italie indemnise, par exemple, ses demandeurs d’emploi à hauteur de 75% pendant six mois avant que ce taux soit progressivement diminué de trois points tous les mois qui suivent. L’Espagne indemnise les chômeurs à hauteur de 70% les 180 premiers jours de chômage avant de faire passer ce taux à 60%. La Belgique aussi a opté pour une indemnisation dégressive qui démarre à 65% pour les trois premiers mois de chômage avant de diminuer progressivement en fonction de la situation familiale et personnelle de chaque demandeur d’emploi.
La Suède, la Finlande, le Royaume-Uni et l’Irlande se démarquent quant à eux nettement de leurs voisins européens. Dans ces pays, l’indemnité chômage n’est pas fixée en fonction du salaire de référence, mais par un système forfaitaire. En Finlande et en Suède, les chômeurs reçoivent respectivement 1 110 et 1 009 euros par mois. En Irlande, l’indemnité chômage peut atteindre au maximum 880 euros quand elle ne dépassera pas 380 euros mensuels au Royaume-Uni qui est incontestablement le pays le moins généreux d’Europe avec ses demandeurs d’emploi.
Des conditions d'accès à l'assurance chômage très variables
Les conditions d’accès à l’indemnisation sont cependant très variables d’un pays à l’autre. L’Italie a certainement les conditions les moins contraignantes pour obtenir une indemnisation, car il ne faut avoir travaillé que trois mois sur les 48 derniers mois écoulés pour débloquer des droits. En revanche, pour obtenir un mois d’indemnisation, il faut en avoir travaillé deux. En France, il faut avoir travaillé six mois sur les 24 derniers mois pour débloquer six mois d’indemnités, ce qui en fait un système plus facile d’accès que celui des Pays-Bas où il faut avoir travaillé six mois sur neuf pour obtenir une indemnisation.
La plupart des autres pays européens ont, de leur côté, placé la barre plus haut en demandant douze mois d’emploi pour débloquer des droits. C’est le cas de la Belgique (12 mois de travail sur les 21 derniers mois), du Portugal et de la Suisse (12 mois travaillés sur les 24 derniers mois), de l’Allemagne (12 mois travaillés sur les 30 derniers mois) et l’Espagne (12 mois travaillés sur les 72 derniers mois).
Trois autres pays ont, quant à eux, opté pour un accès à l’assurance chômage conditionné à l’obtention d’un revenu minimum à atteindre. Pour ouvrir des droits à l’assurance chômage en Norvège, il faut par exemple avoir touché au minimum l'équivalent de 15 049 euros sur les 12 derniers mois. Au Royaume-Uni, le seuil est fixé à 7 011 euros à atteindre sur les 24 derniers mois. Le Danemark, qui indemnise très bien ses demandeurs d’emploi, a néanmoins fixé un niveau de salaire à atteindre bien plus élevé. Pour avoir le droit à une indemnité chômage, les Danois doivent avoir gagné au minimum 33 062 euros de salaire sur une période de référence de 36 mois.