Abderrahmane et Akila menaient une vie de retraités à l’apparence paisible dans un village de l’Hérault quand, à l’été 2018, après 54 ans de mariage, l’ancien chauffeur-livreur a tué son épouse d’une quarantaine de coups de pelle, sur fond de séparation.
«Pas tout à fait d’accord»
«Reconnaissez-vous les faits?», demande la présidente de la Cour d’assises de Montpellier, où Abderrahmane K. comparaît jusqu’à vendredi pour le meurtre de sa femme, Akila C., 73 ans, épousée à Lyon le 13 novembre 1964. Cheveux gris, lunettes et chemise bleue sortie du pantalon, il reconnaît les faits, d’une voix parfois difficilement compréhensible. Mais il ajoute ne «pas être tout à fait d’accord» avec les conclusions de l’enquête, qui lui valent d’être en détention provisoire depuis 4 ans.
Né en 1939 en Algérie, se décrivant comme «français depuis toujours», l’homme, aujourd’hui âgé de 83 ans, est jugé pour meurtre, avec la circonstance aggravante qu’il s’agissait de son épouse. Il risque la réclusion à perpétuité.
Gisant dans une mare de sang
Appelés par le frère de l’accusé, le 2 août 2018 en milieu de soirée, les gendarmes intervenaient dans la maison avec piscine du village de Villemagne-l’Argentière, zone de moyenne montagne de l’ouest de l’Hérault, où le couple avais pris sa retraite après une cinquantaine d’années passées à Grenoble. Abderrahmane K., 79 ans à l’époque, avait expliqué aux gendarmes qu’il venait de tuer sa femme. Celle-ci gisait dans une mare de sang au fond du garage, le visage détruit par une quarantaine de violents coups de pelle-bêche, selon le rapport d’autopsie.
En garde à vue, le retraité avait expliqué avoir «perdu la raison». Le lendemain, il tentait de se suicider. Quelques mois plus tôt, en avril 2018, Akila C. avait introduit une requête en divorce. Puis, en juillet, mari et femme avaient déposé des plaintes croisées, lui accusant son épouse de vol de documents, elle lui reprochant des violences.
Un «chaos interne»
Interrogé par la présidente sur ses cinquante ans de mariage, Abderrahmane K., arrivé en France de son Algérie natale à l’âge de 16 ans, ne laisse pas transparaître ses sentiments.
Il raconte une vie «normale»: «On ne s’est jamais privés, on faisait des cadeaux aux anniversaires des filles (ndlr: Malika, Sonia et Nabila, nées entre 1965 et 1970), des vacances au Sénégal ou aux Etats-Unis, ou encore des sorties à vélo avec Akila». Selon le rapport de l’enquêtrice de personnalité entendue mercredi, derrière cette «vitrine parfaite» régnait en fait un «chaos interne» au sein de ce couple désireux avant tout de se démarquer de ses origines algériennes.
Le Matin