Candida auris : faut-il avoir peur de ce champignon résistant qui tue jusqu'à 60 % des personnes infectées ?
Un champignon inquiète les scientifiques du monde entier. Le Candida auris est très résistant, contagieux, et son taux de létalité est très élevé. Aux Etats-Unis, le nombre de cas a triplé en un an.
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Les États-Unis s'inquiètent d'une "menace" pour la santé publique. Dans un récent communiqué, les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) - l'agence fédérale américaine en charge de la santé - évoquent une propagation à "un rythme alarmant" d'un champignon dans les établissements de santé américains.
Ce champignon, c'est Candida auris, une espèce de levure - c'est-à-dire un champignon unicellulaire - déjà connu depuis plusieurs années. Sa particularité: il se montre particulièrement persistant sur les surfaces - qu'il s'agisse de matériel médical, du sol, des montants du lit ou des draps - mais aussi résistant à la désinfection ou aux produits antifongiques.
Un hôpital de New York a même dû arracher une partie du sol de la chambre d'un patient après son décès pour se débarrasser du champignon, rapportait franceinfo, citant un article du New York Times. À ce sujet, les CDC s'inquiètent d'ailleurs du triplement, en 2021, du nombre de cas résistants aux médicaments antifongiques recommandés pour le traitement des infections à Candida auris.
Un risque pour les personnes immunodéprimées
Décrite pour la première fois en 2009 au Japon, cette levure a depuis été observée sur les cinq continents. Si Candida auris ne présente aucun risque pour les personnes en bonne santé, il peut être mortel pour celles et ceux dont le système immunitaire est affaibli, comme les personnes âgées ou les patients lourdement hospitalisés.
Des infections particulièrement graves qui sont d'ailleurs en augmentation: les CDC assurent ainsi qu'entre 2019 et 2021, le nombre d'infections a triplé outre-Atlantique, passant de 476 à 1471 cas.
Si ce champignon pénètre la circulation sanguine de ces personnes immunodéprimées - via un cathéter ou une plaie, ce qui explique sa prolifération en milieu hospitalier - l'infection devient massive et atteint le système nerveux, les os et les organes.
"Si vous êtes en réanimation et que vous avez une candidémie, vous avez une chance sur deux de mourir dans les trente jours", remarquait pour franceinfo Stéphane Bretagne, directeur adjoint du Centre national de référence des mycoses invasives et antifongiques à l'institut Pasteur.
Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le taux de mortalité atteint en effet 29% à 53% des cas. L'OMS le classe ainsi parmi les 19 agents pathogènes fongiques prioritaires.
"Ce n'est pas un champignon tueur"
Sur le continent européen, entre 2019 et 2021, quelque 327 patients ont été touchés dans cinq pays dont la France, estime Eurosurveillance, la revue européenne consacrée à la surveillance, l'épidémiologie, la prévention et le contrôle des maladies infectieuses.
En France, seuls six cas ont été identifiés. Mais ce champignon inquiète du fait de sa létalité élevée, pointe le Haut Conseil de la santé publique, "essentiellement attribuable aux nombreuses comorbidités observées chez les patients infectés ou colonisés". Pour rappelle, entre 200.000 et 300.000 personnes sont immunodéprimées dans le pays.
Mais Stéphane Bretagne, également chef du service de parasitologie-mycologie de l'hôpital Saint Louis (AP-HP), se voulait cependant rassurant dans un article de Sciences et avenir qui date de 2019, lorsque Candida auris a commencé à être présenté comme le "champignon tueur des hôpitaux".
"Les humains, comme la plupart des mammifères, sont naturellement très résistants aux champignons." Et ajoutait: "Ce n'est pas un champignon tueur, il faut rassurer la population."