Législatives en Italie : la zone euro menacée par une nouvelle crise
La possible arrivée au pouvoir de l’extrême droite italienne réveille la crainte de revivre une crise de la zone euro, comme en 2012.
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L’Italie est à nouveau au centre des regards. La probable victoire de Giorgia Meloni, leader du parti post-fasciste, aux élections du 25 septembre fait craindre une nouvelle crise de la dette, semblable à celle que la zone euro a connue il y a dix ans. Son programme prévoit en effet de renégocier l’utilisation des fonds du plan de relance européen, ce qui pourrait déboucher sur un bras de fer avec Bruxelles.
L’Italie doit recevoir 191 milliards d’euros du plan de relance, ce qui en fait le premier bénéficiaire dans l’Union. « Ce plan est destiné à financer des réformes structurelles. Mais face à la crise énergétique qui se profile, la coalition veut utiliser ces fonds de façon plus court-termiste, pour gérer la crise », explique Julien Marcilly, économiste du cabinet GSA, qui conseille les gouvernements sur la dette souveraine.
Or la Commission ne veut pas en entendre parler. Les Européens redoutent un creusement du déficit budgétaire dans ce pays, déjà endetté à hauteur de 150 % du PIB – le taux le plus haut de la zone euro derrière la Grèce –, une envolée du taux d’intérêt sur la dette italienne menaçant à terme la zone euro d’éclatement.
La « flat tax » pourrait coûter cher
Ce scénario noir ne semble toutefois pas le plus probable aujourd’hui, aux yeux des observateurs. Interrogé par La Croix, François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, se montre plutôt rassurant : « Je note juste que les différents partis politiques italiens ont marqué, tous, leur attachement à l’euro et aux règles européennes. »
De fait, Giorgia Meloni a largement infléchi son discours pour le rendre plus eurocompatible. Tout en endossant les projets de réforme les plus dispendieux du programme de la coalition, comme celui qui vise à introduire un impôt à taux fixe (flat tax), elle a mis en garde : « Attention à ne pas faire de promesses irréalistes. Il faut tenir compte de nos finances. » Une preuve de pragmatisme qui a été appréciée par la Confindustria, la principale association des entreprises italiennes.
En 2012, Super-Mario avait sauvé la zone euro
Le contexte est également différent de celui de 2012 : les banques italiennes sont davantage capitalisées, les entreprises moins endettées, la croissance plus forte, alors que les premiers effets du plan de relance commencent à se faire sentir. Et surtout, l’attitude de la Banque centrale européenne (BCE) a changé, précisément depuis la crise de 2012.
À l’époque, Mario Draghi, à la tête de la BCE, avait annoncé son intention d’intervenir « quoi qu’il en coûte » pour éviter l’envolée du taux italien. Cela avait suffi à calmer les marchés et éviter que l’écart se creuse entre le taux italien et le taux sur la dette allemande, le « spread », considéré comme le principal indicateur de risque pour la dette italienne.
« Cette intervention a marqué un changement d’identité de la BCE », estime Marcos Carias, économiste de l’assureur crédit Coface. Depuis, la Banque centrale a toujours veillé à ce que le spread ne dérive pas. Elle a mis en place, l’été dernier, un nouvel instrument dit « anti-fragmentation » qui lui permettra de réagir massivement en cas de dérive.
L’Italie, troisième économie de la zone euro
Il ne peut être activé que si l’Italie respecte strictement son programme de réformes qui accompagne le déblocage des fonds du plan de relance. Mais selon Marcos Carias, un accord entre l’Italie et les institutions européennes reste le scénario le plus probable : « L’Italie est la troisième économie de la zone euro. Une crise aurait un coût insupportable : la Commission et le gouvernement italien sont obligés de trouver un compromis », juge-t-il.
« On peut effectivement argumenter que la situation économique a changé par rapport au moment où le plan de relance a été mis en place. Les Européens pourraient donc décider qu’un petit pourcentage des fonds du plan de relance peut être réaffecté », estime Julien Marcilly. Pour cela, il faudrait un accord du Conseil européen, difficile à atteindre, mais possible.