Pour résoudre la crise énergétique, les ministres de l'Energie turbinent
Entre mesures d’urgence et réforme en profondeur, l’Union européenne cherche la voie pour répondre efficacement à la crise énergétique sans briser un outil qui fonctionnait jusqu’ici assez bien: le marché intérieur de l’énergie.
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Les dirigeants européens marchent sur des œufs. D’un côté, ne pas affoler les populations, rassurer les milieux économiques, et de l’autre se confronter à une situation délicate et incertaine.
Les pays de l'UE étaient dépendants à 45% du gaz russe. Aujourd'hui, si on prend les flux envoyés par les Russes, ce chiffre est tombé à 10%. « Le marché a réussi à remplacer le gaz russe qui manquait par du gaz naturel liquéfié ou par une destruction de la demande puisque certains industriels se sont arrêtés, explique Thierry Bros, expert énergie et professeur à Sciences Po. Mais les derniers pourcentages manquants seront impossibles à remplacer parce qu’il n’y a pas de GNL disponible. Il n’y a pas de gaz disponible et il n’y a pas les infrastructures pour recevoir tout ça en Europe. »
Sur le gaz, la Russie a les meilleures cartes en main. C'est « Moscou qui décidera du degré de récession en Europe », expliquent même certains spécialistes gaziers. C'est pour cette raison que les gouvernements insistent en ce moment sur la nécessité de réduire la consommation. Le Conseil européen a validé cet été un plan permettant la réduction de 15% de la consommation de gaz.
Des stocks de gaz suffisants pour une cinquantaine de jours
Pour passer un hiver serein, il faut des stocks de gaz. Au niveau européen, les stockages souterrains ne sont pas encore pleins à 90%.
Pour pallier le manque de gaz russe, de nouveaux contrats ont été passés. Dans ces réserves, on trouve du pétrole de schiste venu des États-Unis, du gaz naturel liquéfié du Qatar. Ils seront suffisants pour tenir plus d’une cinquantaine de jours, assure-t-on à Bruxelles. Mais le vrai problème pour les Européens, c’est le prix de ce gaz multiplié par 20. « Ça a un impact très important pour nos industriels, explique Nicolas Meilhan, ingénieur et expert sur les questions énergétiques. Alors que les particuliers seront protégés par le bouclier tarifaire et les tarifs réglementés, ce n’est pas le cas des industriels qui voient leurs coûts de production exploser. Ils ne vont pas partir tout de suite, mais ils ont déjà commencé à fermer. C’est le cas dans la fonderie, dans l’aluminium et dans l’industrie du verre. »
L’industrie pétrochimique allemande qui tourne grâce à ce gaz russe s’inquiète. Ces sociétés pourraient bien délocaliser leurs productions, notamment aux États-Unis où le gaz est aujourd’hui dix fois moins cher qu’en Allemagne.
Réduction de la consommation d’électricité
Il y a une nécessité de trouver des alternatives. L’UE s’est engagée à ne plus d'importer de pétrole ni de gaz russe d'ici à 2027. Pour cela, il faut pérenniser les partenariats avec d’autres fournisseurs. Quels investissements seront faits par les Vingt-Sept, avec quels producteurs et à quel horizon ? Des réponses s’imposent selon Thierry Bros : « Il ne serait pas entendable pour le Qatar ou l’Algérie d’avoir un discours des Européens disant : "On a besoin de gaz tout de suite, mais ça ne sera pas le cas dans dix ans." Dans toutes les énergies, les investissements se font sur le long terme. Il faut revoir notre transition énergétique et dire à ces pays ce que l’on veut vraiment. »
Sur l’électricité, là aussi, objectif plafonnement des prix et réduction de la consommation. La Commission européenne prévoit de réformer le marché de l’électricité. Il s’agira de plafonner à 200 euros, le prix du mégawattheure vendu sur le marché européen.