Mondial au Qatar : accusée de "travail forcé", une filiale de Vinci convoquée par la justice
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Le géant du BTP Vinci écrit regretter que « sa filiale (ndlr : Vinci Constructions Grands Projets) fasse l’objet d’une mise en examen », en anticipant une décision qui appartient au juge mercredi. L’entreprise française dit réfuter les accusations, notamment de « travail forcé » et de « traite d’êtres humains », à deux semaines de l’ouverture du Mondial-2022.
Le journal « Le Parisien » avait rapporté dimanche qu’une telle convocation aurait lieu mercredi par un juge d’instruction de Nanterre.
Trois chantiers visés
Le dossier remonte à 2015, et une première plainte a été classée sans suite en 2018. Mais des plaintes émanant des associations Sherpa et Comité contre l’esclavage moderne (CCEM), ainsi que de sept ex-employés indiens et népalais de ces chantiers, ont entraîné l’ouverture d’une enquête par un juge d’instruction en novembre 2019.
Trois chantiers sont décriés par ces plaignants : celui du « métro léger » ralliant Doha à Lusail, ville nouvelle qui accueillera la finale de la Coupe du monde de football ; celui des parkings souterrains de Lusail ; ainsi que ceux du chantier de l’hôtel de luxe Sheraton, au cœur de Doha.
Les plaignants accusent Vinci, Vinci Construction Grands Projets (VCGP), sa filiale Qatari Diar Vinci Construction (QDVC) et leurs représentants, de « réduction en servitude, traite des êtres humains, travail incompatible avec la dignité humaine, mise en danger délibérée, blessures involontaires et recel » notamment, selon la plainte.
Vinci « n’a cessé de réfuter vigoureusement les allégations portées à son encontre concernant des chantiers au Qatar menés par l’entreprise QDVC » et « continuera de collaborer avec la justice », explique le groupe lundi dans son communiqué.
Travailleurs migrants
Pour organiser la compétition de football, le Qatar a confié la concrétisation de gigantesques travaux de construction (stades, routes, hôtels…) à une armée de travailleurs migrants. Dès les premiers coups de pioches, des ONG ont dénoncé les conditions de travail imposées à ces ouvriers.
Selon les témoignages recueillis à l’époque par l’ONG Sherpa, les employés immigrés de Vinci sur certains chantiers ont dit avoir travaillé, passeport confisqué, entre 66 et 77 heures par semaine. Et ils auraient été entassés dans des chambres exiguës aux sanitaires insuffisants, percevant des rémunérations sans rapport avec le travail fourni, menacés de licenciement ou de renvoi dans leur pays en cas de revendications.
« Tumulte médiatique »
Un audit réalisé en janvier 2019 par plusieurs organisations syndicales (CGT, CFDT et CFE-CGC) au sein des activités qataries de Vinci a néanmoins conclu à l’existence de bonnes pratiques sur place en matière d’emploi.
« Nous avons vainement tenté de convaincre le magistrat qu’il n’était pas spécialement opportun après sept ans et demi d’enquête d’envisager une mise en examen dans la quinzaine d’ouverture de la Coupe du Monde de football », a réagi lundi l’avocat de Vinci Jean-Pierre Versini-Campinchi, qui craint « un tumulte médiatique ».