Législatives 2022 : la majorité de Macron menacée
Arrivé de justesse en tête au premier tour des élections législatives, le camp présidentiel risque de ne pas disposer d'une majorité absolue à l'Assemblée.
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Un score historiquement faible qui renforce ses adversaires à droite...
Un camouflet. Ce dimanche soir, le premier tour des élections législatives a été marqué par un nouveau revers pour la macronie, après son mauvais score du 2ème tour de la présidentielle. Terminant deuxième avec 25, 8% des suffrages exprimés ce dimanche pour le premier tour des législatives, la coalition macroniste Ensemble ! qui fédère le Modem de François Bayrou et Horizons d’Édouard Philippe derrière Renaissance (ex-LREM), pourrait en effet échouer à obtenir une majorité absolue à l’Assemblée Nationale.
Un score catastrophique comme le rappelle l’éditorialiste du Figaro Guillaume Tabard. « Jamais un cartel présidentiel n’aura obtenu un score aussi faible » dans l’histoire de la Vème République explique-t-il. Le résultat d’une campagne que certains reprochent à Macron d’avoir voulu contourner et de la victoire relative de la NUPES de Mélenchon, qui arrive en tête avec 26,2% des suffrages malgré tandis que l’abstention record qui culmine à 53% des inscrits.
Il y a quelques semaines encore, après l’échec du projet de la formation d’un parti unifié de la macronie, le Président espérait pouvoir obtenir une majorité absolue pour ses députés Renaissance et ainsi conserver une autonomie par rapport à ses alliés du Modem et d’Horizons. Après le 1er tour, ce projet est définitivement enterré, tandis que la coalition Ensemble ! elle-même pourrait n’obtenir qu’une majorité relative.
Un cas de figure qui obligerait le gouvernement à faire alliance avec la droite pour gouverner et qui n’est pas sans déplaire aux Républicains, arrivés quatrième avec 13,6% des voix après le résultat catastrophique de Valérie Pécresse à la présidentielle. S’ils pourraient perdre entre vingt à cinquante sièges de députés sur une centaine actuellement, cette situation leur permettrait de peser à nouveau en imposant leurs conditions au chef de l’État en échange de leur soutien au parlement. « Nos députés vaudront de l’or » espère ainsi un membre de LR cité dans Le Point.
Conscient de la nouvelle localisation offerte par les difficultés de la majorité présidentielle après les résultats du premier tour des législatives, Christian Jacob, le président de LR, détaillait ainsi dimanche soir : « Nous sommes en situation de jouer un rôle déterminant dans cette législature entre les extrêmes et l’immobilisme conduit par le président Macron. » Avant de conclure : « Nous voterons les textes quand ils seront constructifs. Nous nous opposerons durement quand cela ne sera pas le cas. »
... et qui accentue les contradictions du macronisme
Au-delà de l’échec que signifierait une telle dépendance, cet horizon est gros de dangers pour la macronie. Après cinq années marquées par la crise des Gilets jaunes, la grève contre la réforme des retraites ou encore les mobilisations de jeunesse féministes, antiracistes et écologistes, Emmanuel Macron fait miroiter ces dernières semaines une « méthode nouvelle » pour son second quinquennat, en promettant d’inclure d’avantage de concertations avec les corps intermédiaires. L’enjeu ? Trouver un moyen de gouverner le pays en évitant l’explosion sociale mais en continuant à réformer assurent ses proches.
Or, avec une majorité relative, ce projet, déjà délicat au vu de l’instabilité économique et de l’usure du macronisme, risque de devenir mission impossible. De fait, la pression que pourraient désormais exercer les parlementaires LR sur le gouvernement risque d’accroître les contradictions de la macronie, en contraignant Macron à gouverner plus à droite qu’il ne le souhaite tactiquement et en l’empêchant de nouer les compromis sur lesquels il tablait pour intégrer les corps intermédiaires. Ces dernières semaines, Olivier Dussopt et Elisabeth Borne avaient par exemple évoqué la possibilité de céder un peu de terrain sur la réforme des retraites pour convaincre les directions syndicales.
D’autant que cette contradiction est déjà présente au sein même du bloc macroniste. Interrogé ce lundi dans Le Figaro, Édouard Philippe, ancien premier ministre de Macron et dirigeant d’Horizons affirmait ainsi qu’« il est essentiel de maintenir l’élan réformateur » avant de préciser au sujet des retraites sa volonté de voir le gouvernement mener « une réforme ambitieuse », sous-entendu imposer la retraite à 65 ans le plus rapidement possible. Une déclaration loin d’être anodine, qui vise directement les concessions agitées ces dernières semaines et reprend le refrain de la droite qui dénonce un Président « incapable de réformer ».
Déjà affaiblie par sa base sociale étroite, son projet de guerre sociale incapable de convaincre les classes populaires, l’usure du pouvoir et une situation économique marquée par une profonde instabilité, la macronie aborde ainsi le nouveau quinquennat avec un obstacle supplémentaire : une majorité plus fragile que jamais qui pourrait empêcher Macron d’appliquer la stratégie de contention sur laquelle il misait, avec la complicité des directions syndicales.
Dans ce cadre, à l’heure où ces dernières plébiscitent « la modernisation du paritarisme », il est urgent de se préparer à la construction du rapport de forces par la grève et les manifestations, sans permettre au patronat de prendre une longueur d’avance. A rebours des stratégies institutionnelles, qui alimentent des espoirs voués à être déçus à l’image de la promesse d’imposer une « cohabitation » à Macron de la NUPES, le monde du travail et la jeunesse doivent se préparer à riposter sur le terrain des mobilisations dans la rue, les entreprises et les lieux d’étude, en organisant et coordonnant à la base les colères qui s’expriment contre la vie chère et la politique du gouvernement.