Emmanuel Macron, un véritable partenaire d’Uber
Des documents dénichés par des journalistes internationaux montrent l'implication du ministre de l'Economie Emmanuel Macron pour favoriser l'implantation d'Uber, le géant américain du VTC, en France.
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Emmanuel Macron dans la tourmente. Des révélations de la presse internationale démontrent comment Emmanuel Macron, alors ministre de l'Economie entre 2014 et 2016, a œuvré en coulisses pour favoriser l'implantation et le développement en France d'Uber, cette société américaine qui avait suscité le courroux des taxis à son arrivée sur le sol national.
Quelles sont les révélations ?
Une fuite de 124 000 documents internes à Uber, le géant des véhicules de transport avec chauffeur, prouve qu'Emmanuel Macron, lorsqu'il était ministre de l'Economie en 2015, a rencontré à plusieurs reprises le fondateur d'Uber, Travis KLalanick, et des lobbyistes de la société. La loi Thévenoud réglemente alors l'activité des VTC en France. Uber souhaite développer UberPop, ce service qui permet à n'importe quel conducteur de devenir chauffeur pour arrondir ses fins de mois. Accusée de déréguler le marché, l'implantation d'Uber avait provoqué un important conflit social avec les taxis avec des manifestations et des heurts.
Au sein du gouvernement, Uber peut compter sur l'écoute attentive d'Emmanuel Macron, tout jeune ministre de l'Economie. Premier rendez-vous qui ne figure pas à l'agenda officiel d'Emmanuel Macron. Les dirigeants d'Uber en ressortent ravis : "En un mot : spectaculaire. Du jamais vu. Beaucoup de boulot à venir, mais on va bientôt danser", écrit le lobbyiste de la société Mark MacGann après le rendez-vous.
Pendant 18 mois, il y a eu 17 réunions, appels ou SMS entre Emmanuel Macron et Uber, selon les documents internes. Les documents montrent qu'Emmanuel Macron a conseillé à Uber de rédiger des amendements clés en main pour les confier à des députés et pour que les propositions entrent dans le débat public. Lorsque le préfet de police de Marseille prend un arrêté pour interdire Uber, le lobbyiste en chef envoie un SMS directement à Emmanuel Macron. Le ministre lui promet de "regarder cela personnellement". Trois jours plus tard, le décret est supprimé. Lorsque des agents de la DGCCRF (Répressions des fraudes) perquisitionnent le siège d'Uber, Emmanuel Macron est alerté en direct.
Quelle était la position du gouvernement à l'époque ?
À l’époque des rencontres entre Emmanuel Macron et Uber, François Hollande est président de la République et Manuel Valls Premier ministre. Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, qui a la tutelle des taxis, ne voit pas l'arrivée d'Uber en France d'un bon œil. Manuel Valls et le ministre des Transports sont sur la même ligne.
Peut-on parler d'accord ?
Il y a eu un "deal" entre Emmanuel Macron et Uber. Le mot est utilisé au sein d'Uber, selon les révélations. Les révélations de la presse internationale reprennent le terme. Objectif pour Uber : faire modifier les réglementations nationales en sa faveur. Uber veut une loi plus simple pour l'obtention d'une licence VTC. En échange, l'arrêt du très décrié service UberPop semble être dans la balance. Or ce service a bien été supprimé. Quel intérêt avait Emmanuel Macron ? Fascination pour l'entreprise Uber ? Bonne action pour son image ? Éventuel accord financier pour sa future campagne électorale ? Les révélations ne le précisent pas.
Comment réagit l'Elysée ?
L’Élysée indique qu’Emmanuel Macron, comme ministre de l’Economie, était "naturellement amené à échanger avec de nombreuses entreprises engagées dans la mutation profonde des services advenue au cours des années évoquées, qu’il convenait de faciliter en dénouant certains verrous administratifs ou réglementaires". Interrogé par le Monde sur l'arrivée d'Uber en France à l'époque, Emmanuel Macron avait déclaré au Monde : "Notre choix est d’ouvrir notre économie et de créer davantage de mobilité sociale".
Comment réagit Uber ?
Uber France confirme la tenue de plusieurs réunions avec Emmanuel Macron. Ces réunions "relevaient de ses responsabilités en tant que ministre de l'Economie et du Numérique supervisant le secteur des VTC", détaille Uber.
Comment réagissent les personnes impliquées ?
Le préfet de police de Marseille de l'époque, Laurent Nuñez, dément auprès de nos confrères avoir subi des pressions à l'époque. De son côté la DGCCRF, qui avait perquisitionné le siège d'Uber en France, assure ne pas avoir subi de pressions du cabinet du ministre de l'Economie Emmanuel Macron. Interrogé par Le Monde, Bernard Cazeeneuve nie tout accord avec Uber.
D'où viennent les révélations ?
Les révélations sont issues de la fuite de 124 000 documents internes à Uber transmises au quotidien britannique The Guardian et traitées par le Consortium international de journalistes d’investigation (ICIJ) dont Le Monde et Radio France pour la France.
Quelles sont les réactions politiques ?
C'est à gauche que les réactions sont les plus vives. La chef de file des députés LFI à l'Assemblée nationale dénonce un "pillage du pays".
Le secrétaire général du PCF Fabien Roussel évoque des "révélations accablantes sur le rôle actif joué par Emmanuel Macron, alors ministre, pour faciliter le développement d’Uber en France".
Le député Nupes du Val d'Oise Aurélien Taché dénonce "un scandale d'Etat".